Après dix années à passer entre les mailles de plusieurs projets pop-rock, Kevin et Juliette, tous deux originaires de Bretagne mais désormais Bruxellois, se centrent sur un duo plus électro et en français, Rive. Quatre lettres aussi capitales que les questions abordées par leur premier disque Narcose, paru cet été. Explosion et expansion du son, raccord avec la playlist qu’ils nous proposent pour mieux entrer dans l’hiver.

Les mélodies de Rive, éthérées par la voix douce de Juliette, ne doivent pas tromper. A ses offrandes répondent des textes engagés, ancrés, intimes, aux prises avec les tripes et le présent. Comme un lien entre la chair, la tête et le cœur. Filles, Justice, Croisades, Soldats explorent des territoires dystopiques qui s’emparent des conflits, des maltraitances mais aussi des espoirs de l’époque. La dualité Kevin/Juliette, sans cesse en crescendo, filant elle aussi vers un son explosif et solaire. Au rayon de l’actualité, ils viennent de s’associer aux rappeurs Scylla et Sofiane Pamart, sur le disque Sur la Lune 2 (Abyssal/Pias), le temps de deux titres, Sauvage et Dernier Voyage. Titres délicieusement programmatiques.

Nuit, entre toutes les pépites de Narcose, premier album de Rive, convoque la féministe Andrea Dworkin et ses écrits sur l’asservissement des femmes, la négation du plaisir féminin. Des questions qui résonnent profondément auprès de Juliette, féministe affirmée, détentrice d’un master en sociologie, qui en a eu assez des brimades et des quolibets par lesquels certains accueillent les réponses des femmes. « La réappropriation de l’espace public, des rues et de la nuit, dévolues au masculin et pensées pour lui est aussi au cœur de Filles et de son clip. »

Au travers de thèmes qui remettent en question l’ordre du monde (égalité de genres, féminismes, dimension sociale), ou le couple qui se délite et cherche de nouveaux horizons, les paroles de Juliette incarnent une dimension très personnelle, entre utopie et réel terre à terre. « Nous avons, Kevin et moi, deux personnalités rêveuses, sensibles à la beauté poétique des choses, que nous essayons de reproduire dans nos clips. Nous espérons que nos chansons reproduisent ces espoirs de vivre des moments plus heureux. Car une fois qu’on a déconstruit ce qui nous oppresse, qu’est-ce qu’on construit à la place ? Ce chemin vers l’émancipation, c’est le chemin d’une vie. »

Ecoutez l’Autoradio de Rive

(Texte : Nicolas Bogaerts, Clarens, Suisse)