« La route est le premier réseau social »

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Roaditude a fait escale au salon Interoute & Ville le 16 juin dernier à Paris. L’occasion de s’entretenir avec Marc Tassone, directeur général de l’IDRRIM – l’Institut des Routes, des Rues et des Infrastructures pour la Mobilité. 

Roaditude – Marc Tassone, le salon Interoute & Ville 2016, dont votre institut est partenaire, rassemble des milliers de professionnels du génie civil à Paris… Pourquoi sommes-nous si dépendants des routes ?
Un pays se développe avant tout grâce à ses infrastructures de transports. Dans les régions en développement, on commence par construire des routes pour approvisionner la population en eau, en nourriture, et pour s’équiper. On ne s’en rend pas compte en France parce que le réseau est bien établi. On a aussi tendance à oublier que les infrastructures ne sont pas éternelles, qu’il faut les entretenir. Les routes se dégradent inévitablement au passage des voitures et des poids lourds. Il y a aussi l’influence de l’eau. Avec le temps, les revêtements perdent de leur étanchéité, se fissurent et se déforment. Et les cycles de gèle et de dégèle fragilisent les matériaux. Notre rôle à l’IDRRIM est donc de sensibiliser les gestionnaires d’infrastructure (communes, villes,  départements) à l’entretien et à la préservation du patrimoine routier. Si le pont du Gard n’avait pas été sans cesse réparé et restauré, il ne serait plus debout depuis longtemps.

Quel rôle joue la route dans notre vie sociale ?
C’est un lieu de vie et d’échanges. On dit que les rues et les routes forment le premier réseau social. C’est en quelque sorte l’ancêtre de Facebook ! Mais avant d’en arriver là, les routes ont d’abord servi à conquérir le territoire. Les romains les ont construites dans le but de nous envahir avec leur armée. Ce n’est que plus tard qu’elles sont devenues un moyen de communication. Un bien commun dont on ne saurait plus se passer : sans route, les enfants ne peuvent plus aller à l’école, on ne va plus travailler, on ne peut plus se soigner… Le réseau routier conditionne la vie et la vitalité d’un pays.

Quelle est la spécificité du réseau routier français ?
Le réseau français est le plus important d’Europe : il couvre un million de kilomètres et représente, en surface totale, 20 millions de km2, soit l’équivalent d’un département ou de la plus grande carrière de cailloux de France. Avec la décentralisation, l’Etat ne détient plus que 20 000 km de routes : 11 000 km de nationales et 9000 km d’autoroutes concédés à des sociétés privées (SAPRR, Sanef…). Il reste ensuite 376 000 km de départementales et 660 000 km de routes communales gérées par les collectivités et communautés d’agglomérations. Personne ne le sait, mais la valeur estimée de ce patrimoine routier s’élève à 2000 milliards d’euros ! Soit l’équivalent du PIB de la France. Une richesse inestimable.

La route est-elle plus écolo qu’avant ?
Oui car on peut la recycler quasiment à l’infini. La route est rentrée dans un processus d’économie circulaire, de protection de l’environnement et des ressources. Quand la couche de roulement atteint un certain degré d’usure et qu’il n’y a plus assez d’adhérence pour assurer la sécurité des usagers, on réutilise désormais tous les matériaux : cailloux, sable, ciment, bitume. Il n’y a pas si longtemps, on rabotait la surface et on jetait le rabotage avant de remettre une couche neuve. Aujourd’hui, tous les matériaux extraits sont retriés, reconcassés, mélangés. Des composants sont rajoutés pour retrouver une homogénéité, et c’est reparti pour un tour ! Tout peut se faire sur place grâce à des techniques « à froid », comme les émulsions de bitume ou de ciment. Des procédés beaucoup plus écologiques, qui ne produisent pas de gaz à effet de serre (CO2) et qui évitent aussi le ravitaillement avec les camions depuis les carrières ou les centrales d’enrobage.


Pour en savoir plus sur le salon Interoute et Ville, visitez le site Internet www.interoute-ville.com.

(Interview et crédit photo : Roman Scobeltzine)