Amaia et Marvin, nouveau départ
Elle est espagnole, il est français. Tous les deux diplômés d’une grande école helvétique et destinés à une « belle carrière », ils ont largué les amarres pour un road trip en couple et en moto, dont ils ne veulent définir ni la destination, ni la durée, animés par une forte volonté de découvrir le monde, et de questionner nos modes de vie. Rencontre à l’heure du départ.
Roaditude – Amaia et Marvin, qui êtes-vous ? Pouvez-vous vous présenter pour nos lecteurs ?
Amaia – J’ai 32 ans, et je suis née en Espagne. Je suis venue en Suisse pour terminer mes études universitaires après avoir découvert la beauté de la langue française, en 2007, à la faveur d’un échange Erasmus. Ingénieure en mécanique diplômée de l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL), j’ai travaillé plusieurs années dans un bureau d’étude en construisant des prototypes dans plusieurs domaines de l’horlogerie et de l’alimentaire. J’aime la mécanique, bien sûr, mais aussi les voyages et la photographie.
Marvin – Pour ma part, j’ai 30 ans, et j’ai grandi en France, proche de la frontière suisse. J’ai aussi fait l’EPFL, mais dans le domaine du génie civil. Jusqu’à il y a peu, je travaillais comme hydraulicien dans une entreprise spécialisée près de Fribourg. Amaia et moi, nous nous sommes rencontrés il y a 7 ans, dans le cadre universitaire. Nous étions tous les deux membres d’une association de passionnés de musique.
D’où vous vient le goût de la moto ?
Amaia – J’ai toujours rêvé de faire de la moto. Quand j’étais plus jeune, je prenais le vélomoteur de mon grand-père, mais en cachette, car mes parents ont toujours trouvé cela dangereux. En 2014, je me suis lancée, j’ai passé le permis, et je me suis offerte la moto de mes rêves – une Triumph Bonneville, celle avec laquelle je m’apprête à partir.
Marvin – Dans mon cas, ce n’était pas un rêve. C’est Amaia qui a apporté l’idée dans notre couple, et moi, je me suis dit : « pourquoi pas ? » Nous avions la disponibilité de le faire, quelques moyens – et nous nous sommes lancés.
Vous vous apprêtez à partir pour un long périple qui doit vous mener jusqu’à Singapour. Quelle est la genèse et l’idée de ce projet ?
Amaia – J’ai toujours eu des rêves insolites, l’envie de faire des choses différentes et d’avoir des défis. Après mes études, ayant commencé à travailler, j’ai commencé à ressentir une frustration liée au train-train quotidien, au fait d’être dans une voie tracée.
Marvin – Personnellement j’ai depuis longtemps l’idée d’un long voyage, d’un vrai périple pour lequel on coupe les liens, et qui procède vraiment de la découverte. La moto n’est pas une fin en soi pour nous, juste le moyen qui s’est imposé naturellement, vu que nous avions commencé à en faire. Notre but n’est pas de rouler, mais de partir à la découverte de contrées nouvelles, de cultures différentes, en pratiquant la photographie, en rencontrant les gens – et aussi en mangeant, car nous partageons aussi le goût de la bonne bouffe.
On sent chez vous une forte volonté de « couper les attaches »… Vous avez quitté votre job, rendu votre appartement. Pourquoi une rupture si forte ?
Amaia – Je n’aime pas le terme de « rupture », je préfère parler de « nouveau départ ». Nous avons voulu créer les conditions d’une liberté totale, et d’une ouverture maximale, pour voyager sans contrainte, pouvoir aller vers les gens, et ce faisant, aller au fond de nous-mêmes, découvrir ce que nous voulons vraiment. Franchement, il y a quelque chose qui cloche aujourd’hui dans notre société. Nous n’avons le temps de rien faire, la spontanéité manque. Personnellement, je me réjouis beaucoup d’avoir du temps pour vivre les choses, et de retrouver un mode de vie guidé par la spontanéité.
En même temps, vous vous êtes entourés de tout un dispositif pour que l’on puisse vous suivre – blog, page Facebook, compte Instagram. Peut-on y voir un paradoxe ?
Marvin – Non, parce que l’un n’empêche pas l’autre. Bien sûr, il y a nos familles, nos amis et nos partenaires qui veulent qu’on communique. Mais tenir un blog, c’est d’abord pour nous le moyen de conserver une trace pour nous-mêmes de ce que nous allons vivre. Et puis, à nouveau, l’important est de le faire sans contrainte, selon nos envies et notre inspiration.
Partir en couple, ce n’est pas anodin. Avez-vous des appréhensions par rapport à cela ?
Amaia – Bien sûr, c’est un défi. En même temps, Marvin est la personne en laquelle j’ai le plus confiance, donc, s’il y a une personne avec laquelle j’ai envie de voyager, c’est bien lui. En tant que femme, on peut se sentir plus vulnérable, et c’est rassurant de partir sur la route en bonne compagnie.
Marvin – Tant que nous voyagerons, je pense qu’il n’y aura pas de problème. C’est plus au niveau des grandes décisions que des désaccords pourront apparaître. Nous partons vers l’est, avec une direction plus qu’une destination, sans trop savoir quand nous reviendrons, en restant ouverts à ce qui peut advenir. Dès lors, on ne peut pas exclure que des envies différentes apparaissent. Mais ce voyage, nous l’avons rêvé ensemble, nous voulons le faire ensemble. Et si nous ne partions pas, la vie à deux ne serait pas nécessairement plus simple.
La découverte, la photographie, la gastronomie, l’écriture… Il y a plusieurs fils rouges à votre projet. L’un est l’éducation, au sens où vous souhaitez aller à la rencontre de gens qui font l’éducation autrement. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Amaia – Nous nous sommes rendu compte que nos standards de vie étaient très influencés par l’éducation, que celle-ci est la base de nos manières de vivre et de l’organisation de notre société. Nous nous sommes dit qu’il serait intéressant de profiter de ce voyage pour voir, par le biais de rencontres, comment se fait l’éducation ailleurs, et s’il existe des modèles différents de l’appréhender.
Comment va débuter votre périple ?
Marvin – De la meilleure des manières, puisque plusieurs amis vont nous accompagner pour la première journée de route, direction l’est de la Suisse. Après, nous serons livrés à nous-mêmes…
Alors, on vous souhaite bonne route, et on vous retrouve au début de l’été pour un premier partage d’expériences !